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Legendes du rugby francais (Tome 1)

2 participants

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Legendes du rugby francais (Tome 1) Empty Legendes du rugby francais (Tome 1)

Message  Papillon Mer 15 Nov - 16:25

OK, tout d'abord, laisser moi preciser que c'est pas ma faute, c'est Arno qui m'a cherche....mais comme il y avait pas besoin de me pousser trop longtemps, je commence mon recueil de legendes du rugby francais.

Et pour commencer, quoi de plus normal que l'exploit fondateur, l'evenement qui placa le XV de France au centre de la carte mondiale du rugby, la tournee en Afrique du Sud 1958.

Ci dessous un texte, ecrit de main de maitre par Denis Lalanne (seul journaliste ayant suivi la tournee) extrait de son livre legendaire "Le grand combat du XV de France" (que je peux vous preter si vous souhaitez lire tous les details croustillants.

Le texte est long donc ne vous y lancer pas si vous n'etes pas un passione des "histoires truculentes de vieux cons" mais moi perso c'est ce genre de recits qui m'a fait et me fera tjrs etre un passione de ce sport....

16 août 1958 : « le grand combat du XV de France »





Legendes du rugby francais (Tome 1) Hist_1958
Photo : Le pilier Alfred Roques (à gauche) fut un des atouts maîtres du XV de France face aux terribles avants sud-africains.
Le 16 août 1958. C’est toujours de mémoire que j’évoquerai l’événement de ce jour-là, et, ainsi, pour la demi-finale Australie-France de la première Coupe du monde de rugby, la vertigineuse demi-finale Nouvelle-Zélande-France cette année à Twickenham, la sixième veste de Jack Nicklaus au Masters de golf, la révélation du jeune Pete Sampras à Flushing Meadow, de crainte que ces exploits majeurs dans mon souvenir n’aillent perdre de leur magie à la lumière de documents par trop irréfutables. De toute manière, les caméras faisaient défaut à l’Ellis Park de Johannesbourg, le 16 août 1958, et c’est tant mieux pour le rugby de rêve, car une réplique filmée serait encore bien capable de témoigner d’un match de médiocre niveau.
16 août 1998. Quarante ans plus tard, nous nous retrouvons tous sous les platanes de l’abbaye de Tholomies, au cœur du Minervois, chez Lucien Rogé, qui a organisé le rendez-vous avec amour, sans oublier rien ni personne. Voilà la preuve d’une prouesse sentimentale au possible, qui se moque de la note technique qu’on lui accorderait : une belle preuve, en effet, puisque le troisième ligne aile Lucien Rogé ne jouait pas le test-match désormais légendaire de l’Ellis Park. Son nom ne figure pas au programme. Lucien Rogé était dans les tribunes, le 16 août 1958, aussi malheureux qu’on peut l’être quand il a fallu donner son maillot à un autre, que les patrons de l’équipe, à tort ou à raison, lui ont préféré.
Mais Lucien Rogé en a conçu si peu d’amertume, il a gardé de la prodigieuse aventure un sentiment si fort qu’il n’a laissé à personne d’autre la joie d’organiser ces puissantes retrouvailles. Quarante ans plus tard, tout le monde est là, chacun avec ses vieilles douleurs et son cœur de junior. Tout le monde sauf les disparus, Michel Vannier, Pierre Lacaze, Louis Cazaux, André Haget, Guy Stener, Robert Vigier. Six copains décédés au nombre des vingt-sept joueurs qui ont écrit en Afrique du Sud, durant l’été de 1958, la page la plus héroïque, assurément, de l’histoire du XV de France.
Il s’agissait de la première tournée australe entreprise par des Tricolores, à une époque où la France ne siégeait pas à l’International Rugby Board, par conséquent n’était pas considéré comme une nation majeure du rugby, sans compter qu’un an auparavant, en 1957, elle avait eu droit à la mythique cuillère de bois dans le Tournoi des cinq nations : quatre défaites consécutives !
A une époque, également, où l’on s’embarquait pour un tel voyage dans un avion à hélices affrété aux moindres frais par la nation invitante, pareillement chiche sur les suppléments de vin rouge, car il n’était pas sûr que les recettes au stade couvriraient les frais de l’expédition.
Qui, en Afrique du Sud, se déplacerait pour voir à l’œuvre une équipe qui, la fois précédente, le 16 février 1952 à Colombes, avait été surclassée par les Springboks, encaissant six essais sans pouvoir en rendre un ?
Autant dire qu’on ne faisait pas les fiers à l’embarquement, ce soir de juillet 1958, au Bourget, quand il n’était question dans le pays que du récent exploit de nos footballeurs, demi-finalistes de la Coupe du monde en Suède. Pour comble de misère, il fallait déplorer les absences de Maurice Prat, André Boniface, Jacky Bouquet, Claude Mantoulan, Pierre Albaladejo, Henri Domec, Amédée Domenech, Michel Crauste, rien que de grosses pointures. Et l’on partait sans entraîneur, sans soigneur, sans indemnités. Aussi, lorsqu’au premier matin du voyage, il devint clair que notre zinc était en train de rendre l’âme et qu’il fallut se poser en catastrophe à Kano, au Nigéria, pour trouver refuge dans un hospice pour nécessiteux, plus que jamais s’imposa l’image d’une équipe de bras cassés.
Six semaines plus tard, changement de décor ! Les suppléments de vin rouge ont été réglés. Il ne reste plus un billet en vente, le 16 août 1958, pour le second test-match France-Afrique du Sud, à l’Ellis Park de Johannesbourg. La tournée a été une suite de surprises, d’affrontements sans pitié, de malentendus tels que la presse sud-africaine en a fait ses choux gras. Partout on s’est précipité pour voir à l’œuvre ces bêtes curieuses de Français, qui se sont fait des alliés dans la population noire, que l’on questionne sur Brigitte Bardot, le général de Gaulle, le sexe, la gastronomie, et qui ont surtout eu le don de renverser tous les pronostics, de survivre à une terrible série de blessures qui ont touché Michel Celaya, Pierre Danos, Lucien Mias, Michel Vannier, Louis Cazaux, Louis Echavé, Henri Rancoule, Jacques Lepatey. Seuls de ceux-là, Mias, Danos et Rancoule ont été rétablis à temps pour jouer le premier test-match au Cap, conclu par un match nul (3-3) : affaire plutôt insipide, celle-là, mais déjà une surprise considérable, car les avants français ont complètement muselé le fameux pack des Springboks, lesquels s’attendaient plutôt aux déferlantes de nos trois-quarts.
Le second test-match sera capital car, pas une fois depuis le siècle dernier, les Springboks n’ont été battus dans une série de tests sur leur sol, ni par les All Blacks, ni par les Wallabies australiens, ni par les Lions (sélection des joueurs britanniques). En vue de l’épreuve de vérité, les Français devront racler leurs fonds de tiroir pour aligner quinze joueurs valides. Sans autre solution possible au poste d’arrière après la dramatique blessure de Vannier, genou broyé, « Papillon » Lacaze jouera avec deux infiltrations de novocaïne à la cheville, une avant le coup d’envoi, une autre à la mi-temps. Comment donc ces soldats de Valmy, sans soigneur, sans entraîneur et même sans capitaine – Michel Celaya, blessé d’entrée et perdu pour l’ensemble de la tournée – ont-ils fait pour provoquer ainsi l’orgueil fou du rugby sud-africain ?
Plusieurs explications. La première tient en peu de mots, une réplique désarmante du pilier Alfred Roques, de Cahors, que l’on félicitait pour avoir joué sans un mot neuf matchs sur dix de la meurtrière tournée. « Bah ! dit-il, quand on ne travaille pas, c’est facile ! » Pour la première fois, en effet, des joueurs de rugby français ont pu mener pendant six semaines une existence de professionnels, avec entraînement quotidien, en réalité une sinécure pour un travailleur de force comme Alfred Roques. Ils en ont profité pour accomplir des progrès techniques stupéfiants.
Il est probable aussi que les Springboks n’ont pas entendu l’avis de tempête diffusé quatre mois plus tôt par les Australiens : « A toutes les équipes du monde, attention ! La France vient de se découvrir un pack extraordinaire. » En l’espace de trois semaines, en effet, ce pack révolutionnaire a tout cassé sur son passage. Le 9 mars, à Colombes, il a plié les Wallabies (19-0). Le 29 mars, il a signé la première victoire française à Cardiff (16-6), et le public de l’Arms Park, connaisseur entre tous, lui a fait une inoubliable « standing ovation ». Le béton de ce pack, c’est la tête de mêlée Roques-Vigier-Quaglio. La figure de proue, c’est Jean Barthe, le superbe numéro 8. Le cerveau, c’est Lucien Mias, l’homme qui a tout compris et tout assumé. Il a rompu avec une époque de brillant et de facilité lorsqu’il a dit à Amédée Domenech, le populaire pilier : « Tu es le meilleur de nous tous. Mais, sans toi, nous sommes tous meilleurs. Aussi, tu ne joueras pas. » Quelques années plus tard, un grand chef d’entreprise français m’abordera pour me dire que sa propre « success story » s’expliquait pour avoir appliqué ce discours à la lettre.
Et voilà donc ce qu’on ne verra plus jamais : une grande gueule d’étudiant en médecine imposant son moral énorme, sourd à la critique, aux gros pardessus de sa fédération, et doublant tous les caps comme un Magellan de l’ovale, à la tête de son pack des tempêtes. Le bonheur pour Mias fut de se trouver un allié naturel en la personne du directeur de la tournée, Serge Saulnier, d’un commerce brutal et d’une passion entière, peu disposé à s’en laisser conter par les autorités sud-africaines. Dès le premier entraînement, comme un observateur de l’endroit lui faisait valoir que les introductions françaises en mêlée n’étaient pas correctes, il mit tout de suite les choses au point : « Eh bien ! dit-il, nous nous mettrons en règle sitôt que nous aurons vu comment vous vous y prenez, de votre côté, pour tricher ! »
Il y eut enfin une circonstance bien propre à soutenir le moral d’une équipe débarquée en terre inconnue et rapidement éprouvée par les blessures, à savoir la présence de trois joueurs du Paris Université Club – Guy Stener, André Haget et André Frémeaux – relançant le répertoire du Quartier Latin à chaque fois que la malchance pouvait frapper. A chaque épisode dramatique son dénouement désopilant et un nouveau départ en chantant. Comme c’était aussi le temps où l’on ne remplaçait pas un joueur blessé en cours de match, la tournée prit un tour héroïque, que les Basques définissent ainsi : « Ou tu fais le boucher, ou tu fais le veau. » A se demander même comment on peut aujourd’hui, avec 22 joueurs autorisés à participer, entretenir pareil esprit d’équipe.
Dans le genre, le comble fut atteint lorsque, le 16 août 1958, en s’échauffant sur le vaste parking de l’Ellis Park, à une heure du coup d’envoi, le talonneur Robert Vigier fut saisi d’un vertige qui sera bel et bien diagnostiqué, quelques jours plus tard, comme un infarctus du myocarde. Vigier a joué avec ça « le grand combat du XV de France ».
Je crois qu’il faisait très beau et que le soleil du Transvaal sur l’herbe kikuyu nous arrachait les yeux. Je crois que le public noir, parqué derrière un grillage de 10 mètres de haut, n’a jamais autant mangé du Springbok que ce beau samedi-là. Pour être franc, nous étions encore d’une
ignorance et d’une insouciance coupable à l’endroit du problème de l’apartheid. Nous prenions pour argent comptant les concerts de « penny whistles » qui se donnaient la nuit sous nos fenêtres, à une époque où ce n’était pas les blancs mais les « natives » qui étaient en danger dans les rues de Jo’burg.
Le match ? Je le revois, qui se déroule, non comme une page d’histoire, mais comme une affaire tranquillement programmée par un Lucien Mias sûr de son pack et de sa complémentarité, entre son indéracinable tête de mêlée, son preneur de balle en touche, le long et mince Bernard Mommejat, son Ben Hur en numéro 8, ses deux chiens de chasse sur les flancs de la mêlée, François Moncla et Jean Carrère, et, j’allais oublier le principal, la statue du Commandeur, Lucien Mias lui-même, le « Docteur Pack » des grands jours. « Il fut si grand cette fois-là que je m’arrêtais de jouer pour l’admirer » dira le regretté Robert Vigier. « Si j’avais su ça, réplique Mias, je lui aurais bien botté le cul. Nous avons gagné parce que nous étions les meilleurs, voilà tout. » C’est dit sans l’ombre d’une forfanterie, sur la foi d’un sentiment qui habitait Lucien Mias depuis le départ, qui l’habitait encore la veille au soir, où il s’était grisé d’une bouteille de rhum dans le vague propos de guérir une sinusite qui l’importunait.
Il faut préciser à l’intention des derniers venus que l’évocation de ce grand rugby de bohême fera peut-être sourire, que des joueurs comme Quaglio, Barthe, Roques, Vigier, Moncla, Dupuy, Marquesuzaa, ne se feraient surtout pas prier au jeu de rentre-dedans qui se pratique aujourd’hui. Quaglio et Barthe vont suffisamment le prouver lorsqu’ils passeront dans les rangs treizistes professionnels.
France bat Afrique du Sud (9-5) : un but de Lacaze, deux drops de Lacaze et de Martine, contre un essai de Fourie transformé par Gerber.
Ce que le score ne dit pas, ce sont les points que les Springboks furent empêcher de marquer par une défense française fanatisée, en particulier un essai par débordement de Prinsloo sauvé par un retour prodigieux de Jean Barthe, plus Ben Hur que jamais.
Je crois qu’il faisait beau et que le soleil du Transvaal sur l’herbe jaune de l’Ellis Park me brûle encore les yeux.

Denis Lalanne
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Legendes du rugby francais (Tome 1) Empty Re: Legendes du rugby francais (Tome 1)

Message  phm Jeu 16 Nov - 12:28

mon papillon des textes comme cela tu peut nous en ressortir tous les jours.
Merci
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